La docteure qui a caché sa grossesse pour partir au front

C’est l’histoire émouvante de Madame Nguyen Kim Nu Hieu et de Monsieur Nguyen Lan Dung. En 1970, Monsieur Dung menait une recherche scientifique sur le sujet “Lutter contre le Pseudomonas chez les blessés et invalides de guerre” et se rendait régulièrement à l’Institut de Médecine militaire 108 où travaillait la jeune docteure Nu Hieu. Grâce à des collègues entremetteurs, est néeentre eux une histoire d’amour car ils se sont trouvé plusieurs points en commun : le dévouement, l’enthousiasme et la passion du travail. Ecoutons Madame Nu Hieu : “A l’époque il y avait très peu de projections de films, je ne savais pas comment un collègue, Monsieur Quang et son épouse ont pu se procurer 4 tickets de cinéma et nous ont invités anh Dung et moi. On s’est connus et aimés aussi simplement que cela. Il était de petite taille mais rapide et éloquent. J’appréciaissa sincérité, sa franchise, son enthousiame et son dévouement pour ce qu’il faisait.

Faire part de mariage et photos de mariage de Madame Nguyen Kim Nu Hieu et Monsieur Nguyen Lan Dung en 1971

Une cérémonie simple, propre à ce temps de guerre, a été organisée : on servait aux invités du thé et des gâteaux secs. Madame Nu Hieu racontait : “Mes parents ont envoyé un faire-part annonçant que leur fille se mariait. Au thé étaient seulement présents les représentants des deux familles, les autres membres de la parenté et les amis les plus proches. La cérémonie de mariage a eu lieu chez la mariée, la famille du marié était invitée”.

Au début de 1972, le champ de bataille de Quang Tri était atroce. Répondant au mouvement des “ 3 prêt à…”, la jeune docteure Nguyen Kim Nu Hieu s’est portée volontaire pour partir sur le front. Le jour où elle a reçu l’ordre de mission, elle a senti les premiers signes de grossesse. A l’insu de leurs organismes et de leurs familles, le couple est allé à l’hôpital C qui leur a confirmé la bonne nouvelle. Madame Nu Hieu qui avait alors 30 ans savait à quels risques elle et l’enfant étaient exposés. Le couple se retrouvait devant un dilemme, d’un côté assuré la sécurité de l’enfant, de l’autre accomplir la mission d’un soldat-médecin, ce vers quoi Madame Nu Hieu a toujours aspiré. Finalement, encouragée par son mari, Madame Nu Hieu a décidé de partir vers Quang Tri avec le Groupe chirurgical 730B.

Comme tant d’autres unités, il a fallu au Groupe 730B un mois pour traverser la cordillère Truong Son. Madame Nu Hieu : “Nous devions chaque jour venir à bout d’une montagne, la grimper le matin, la redescendre le soir, sac plein d’équipements personnels à dos et fusil à l’épaule. Certains tronçons étaient très pentus, la seule manière de descendre était de s’asseoir à même le sol et de se laisser glisser. A certains moments, nous avancions avec d’un côté un gouffrevertigineux et de l’autre la paroi montagneuse. Nous nous accrochions à la paroi, posant nos pieds sur des pierres de la taille de nos pieds…”. Madame Nu Hieu était déterminée à arriver à Huong Hoa, Quang Tri et son courage a fait l’admiration de ses frères d’armes. En juillet 1972, elle était au 7^ème mois de grossesse, pour sa sécurité, elle a été réaffectée au nord. Elle n’est restée sur le front que quelques mois, mais dès son arrivée à l’hôpital militaire, elle avait travaillé sans relâche à la fois comme médecin, infirmière, aide-infirmière… au service des blessés.

Madame Nguyen Kim NuHieu soignant les soldats sur le front en 1972

Près de 50 ans plus tard, Madame Nu Hieu et son époux sont devenus des médecins et scienfifiques célèbres et leurs recherches ont beaucoup contribué à la société. Leur fils aîné Nguyen Lan Hieu est l’un des Professeurs associés et médecins les plus importants de sa spécialité, Président du CHU de Hanoi et député de la XIV^ème législature. Le fait que Madame Nu Hieuait caché sa grossesse à sa famille et à ses collègues pour partirau front est raconté et exposé dans l’exposition “Fierté de Truong Son”. En regardant avec émotion ces images, Madame Nguyen Kim Nu Hieu a confié : “Je n’avais pas peur car sur le front, vivre ou mourir sont des choses normales. Mais j’avais surtout peur pour l’enfant que je portais. Sur le front, on se servait de l’eau de source et on mangeait les plantessauvages. Heureusement, je me portais bien et je pouvais faire mon travail comme les autres personnes. Etre sur le front était notre aspiration et notre fierté.”

La Colonelle, Professeure associée, Docteure, Médecin du Peuple, ancienne Vice Directrice de l’Hôpital 108 Nguyen Kim Nu Hieuévoquant les souvenirs de guerre pour lescadres du Musée.